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Erased (Kei Sanbe)

Un seinen palpitant! 17/20

Le synopsis

Erased met en scène Satoru Fujinuma, jeune homme de 28 ans, passionné de manga et qui n’aspire qu’à une chose: faire publier ses œuvres et se faire un nom. Malheureusement, comme le montre l’ouverture du tome 1, les éditeurs rejettent son projet, ce qui le plonge dans une phase d’amertume. Pourtant, derrière cette apparence de loser ou de mangaka raté, Satoru dissimule un don: quand un événement dramatique est sur le point de se produire dans son entourage immédiat, il est propulsé quelques minutes dans le passé afin de découvrir la faille et modifier le cours des choses.

La critique

Ce seinen créé en 2012 reprend le thème maintes fois exploré, y compris dans la littérature manga, du voyage dans le temps pour modifier l’avenir. On peut, par exemple, citer Quartier lointain (de Jirô Taniguchi) ou encore Dragon Ball Z dans lequel Trunks retourne dans le passé pour empêcher la destruction du monde par Cell. Mais, avec Erased, on n’est pas à proprement parler dans une œuvre de science-fiction. Mais plutôt dans un thriller psychologique qui use de la science-fiction comme d’un vecteur de l’intrigue. On peut, à partir de là, déceler l’intelligence de ce manga.

Kei Sanbe ne se contente pas d’assembler artistement les séquences du passé et du présent, de relier flashbacks et «rediffusions» dans l’esprit de Satoru, il mêle aussi l’intrigue à l’intrigue pour amener l’esprit du lecteur au-delà de l’évidence. Quand on lit ce tome 1, qu’est-ce qui ressort de manière évidente? Le don de Satoru, sa faculté à retourner dans le passé. Mais ce don le conduit brusquement à l’hôpital suite à un accident avec un camion, et là il a une reviviscence d’un élément profondément enfoui dans son passé: le visage d’une amie d’école décédée.

On comprend dès lors qu’il y a entre ce don de Satoru et le titre du manga un oxymore, c’est-à-dire deux éléments apparemment antinomiques, mais qui s’assemblent à la perfection. «Erased», en anglais, signifie «effacé, gommé». Or, qu’est-ce qui a été effacé? Des fragments du passé de Satoru. Et, en parallèle, Satoru possède une faculté qui le ramène malgré lui…dans le passé.

Voilà donc l’art de Sambe: le thème et le titre du manga sont contradictoires, mais en réalité complémentaires. Ce passé enfouit cache une réalité effroyable: la mort de plusieurs camarades de classe de Satoru dans d’obscures circonstances. Mais que s’est-il réellement produit? Et pourquoi cette vérité enfouie refait-elle surface maintenant? Erased est véritablement un seinen palpitant, avec une construction soignée et un récit qui s’assombrit au fur et à mesure des pages.

L’auteur

On considère souvent que la puissance d’un auteur réside dans sa capacité à innover afin de toujours surprendre son lecteur. Si dans Erased on retrouve le style énigmatique de Kei Sanbe, avec un développement très cinématographique, fait est de constater que le mangaka nous amène dans un univers très différent de ses précédentes œuvres. Il s’était en effet illustré en 2008 avec L’île de Hôzuki, puis en 2010 avec Le Berceau des Esprits, deux œuvres qui jouaient intensément sur le la dimension horrifique des événements.

Le détail

Un élément a attiré mon attention dans ce tome 1: la personnalité de satoru.

«Satoru» signifie en japonais «Celui qui a la parole», et pourtant on découvre un personnage plutôt introverti et peu sociable. Cela transparaît notamment dans le dialogue qui s’engage lorsque la jeune Airi vient le visiter à l’hôpital.

A la page 39 par exemple, elle lui parle d’un rêve, d’un projet qui lui tient à cœur, et lui, sceptique, répond: «Quand tu révèles ton rêve aux gens, tu ne te demandes pas ‘de quoi aurais-je l’air si je n’arrive pas à le concrétiser?’». En fait, il considère que dévoiler ses sentiments aux autres est une imprudence. Ce à quoi elle réplique: «Parler de mes projets à voix haute me donne l’impression qu’ils vont se réaliser!» Donc, dans cette scène l’introversion de Satoru est mise en relief par la spontanéité de Airi.

Mais, en réalité, Kei Sambe, créé à travers ce caractère renfermé un deuxième oxymore. Car, intérieurement, Satoru a des choses à dire, des paroles qui ne peuvent jaillir, parce qu’étouffées par un trauma du passé, et qui subsistent en lui comme un cri silencieux. Les révélations successives feront-elles enfin tonner cette rage intérieure?

La parenthèse

En 2014 Erased (Ki-oon) était un des 10 mangas nominés pour la septième édition du lauréat Taishô. Mais il a dû s’incliner devant Bride stories de Kaoru Mori. Il a de nouveau été nominé en 2015 et a fini en quatrième position sur la liste des 14 mangas sélectionnés.

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