Le Suaire (Liberge)
Une bande dessinée sombre et dure servie par le sublime dessin de Liberge ! 15/20
Le synopsis :
Alors qu’Henri enjoint sa cousine Lucie de rompre ses vœux pour retourner à la vie civile, L’abbé Thomas son protecteur, prend son parti et soutient sa volonté de rester nonne. L’abbé Thomas à cependant un autre problème ; il a bien du mal à financer la construction de l’abbatiale qui doit accueillir un morceau de la vraie croix. Il va alors élaborer un plan, qui l’espère-t-il lui permettra d’arriver à ses fins tout en affirmant son emprise sur la jeune femme.
La critique :
Faisant la part belle à une narration très visuelle où l’image prend largement le pas sur le texte, ce premier tome de cette bande dessinée qui doit à terme en compter trois, nous plonge en plein coeur du Moyen-âge.
L’histoire se focalise sur trois protagonistes : Lucie, Thomas et Henri. Ce dernier éprouve pour sa cousine un amour éperdu et réciproque et l’enjoint de rompre ses vœux pour retourner à la vie civile, ses trois frères étant morts, deux à la guerre, le dernier de la peste. Mais la jeune fille est sous la protection de Thomas, prieur de l’abbaye de Lirey qui se range à l’avis de Lucie qui se refuse à rompre ses vœux. Ce dernier a cependant bien du mal a financer l’abbatiale qui doit accueillir un morceau de la vraie croix. Il va alors imaginer un moyen de trouver des fonds tout en affirmant sa mainmise sur la jeune nonne.
L’ambiance générale qui se dégage de cette bande dessinée, sombre et dure, se nourrit, du graphisme de Eric Liberge. Dégradés de noirs, de gris et de blancs viennent ainsi renforcer cette atmosphère. De fait, le dessin retranscrit parfaitement la misère d’un peuple ravagé par la peste et le fanatisme. En la confrontant à l’opulence et l’insouciance de la noblesse lors du banquet chez le bailli du roi, l’illustrateur met également en exergue le fossé qui séparait les deux classes à cette sombre époque.
Si le scénario n’est pas des plus transcendant force est de constater que cette retranscription historique fidèle et cette volonté de questionner la relation des hommes au pouvoir, à la religion mais aussi à l’amour, constitue un atout majeur. Objet central de cette bande dessinée, le suaire, est ici d’emblée présenter comme faux. Symbole de ralliement, mais surtout d’asservissement, il exploite la ferveur de la populace et apparaît comme le moyen parfait pour le prieur de parvenir à ses fins. Par la même, il permet un questionnement sur les croyances et le pouvoir de suggestion d’une prétendue relique.
Au final, ce premier tome nous offre une plongée intéressante en plein Moyen-âge, dans un univers noir et difficile, où la religion tient une place centrale. Le tout est servi par un beau graphisme qui retranscrit néanmoins assez crûment les scènes violentes mais aussi les stigmates de la peste.
Une BD a conseiller aux amateurs de récits historiques !
L’auteur :
Auteur français de bande dessinée Eric Liberge entre dans le monde de la bande dessinée par le biais des fanzines. Il est, entre autres, l’auteur de Mardi-Gras Descendres.
Romancier et cinéaste français, Gérard Mordillat publie son premier roman Vive la sociale ! En 1981. Il enchaîne ensuite roman, essais, fictions et documentaires pour petits et grands écrans. Il a plusieurs fois collaboré avec Jérôme Prieur lui aussi cinéaste et écrivain et dont le travail est bien souvent en rapport avec l’Histoire. Ce sont notamment les auteurs de Corpus Christi, l’Origine du christianisme et l’Apocalypse.
Le détail :
Fondée en 1974, les éditions Futuropolis publient une quarantaine de titres par an. Elles s’attachent à publier des bandes dessinées originales, libres de tout style et de tout à priori.
La parenthèse :
Le Suaire se déclinera en trois tomes qui dérouleront l’intrigue sur plusieurs siècles et dans plusieurs pays. Le tome 2, paru en septembre 2018, nous plonge ainsi au XIXe siècle à Turin. Tandis que le tome 3 se passera au XXIe siècle au Texas.
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