On ne voyait que le bonheur (Grégoire Delacourt)
Un roman poignant qui aborde des sujets difficiles mais universels! 17/20
Le synopsis :
Antoine a la quarantaine, une femme, deux enfants. Il est expert en assurance et excellence dans son métier pour lequel « il est payé pour payer le moins possible ». Seulement, lorsqu’il apprend que son père est atteint d’un cancer, sa vie bascule. L’heure du bilan sonne le glas de son ancienne vie. Il dissèque alors ses souvenirs d’enfance sans maman, sa vie d’homme, de frère, de père, de fils. Ce qui l’entraînera loin, très loin de sa vie, bouleversée à jamais.
La critique :
Le roman se divise en trois parties. La première est la plus importante et dépeint la vie d’Antoine, et sa lente déchéance quand il apprend que son père est gravement malade. La deuxième a toujours Antoine pour narrateur, mais ce dernier a tellement changé qu’on croirait presque à un autre personnage. L’histoire se déroule alors à l’étranger. Enfin, la troisième partie est centrée sur la fille d’Antoine, Joséphine. Les trois parties se font suite, mais chacune regorge de souvenirs passés.
Cette histoire m’a fait un effet inhabituel. La première partie m’a un peu déçue, l’histoire paraissant somme toute banale. Certes, le petit Antoine a vécu des tragédies pendant son enfance, mais je n’arrive pas pour autant à le trouver intéressant à défaut d’être attachant (ce qu’il n’est pas, au début en tout cas). A la fin de la 1ère partie cependant, l’histoire prend un tournant complètement inattendu (tout en restant dans le drame). Et à partir de là, impossible de décrocher. Les chapitres déjà très courts, se succèdent encore plus rapidement. L’auteur instille des émotions fortes : angoisse, tristesse, désespoir et compassion qui viennent vous tirer des larmes et vous serrer la gorge à tour de rôle.
Le style de l’auteur est un atout original du roman. Il n’est pas seulement percutant, il est aussi multiple. Il évolue en fonction des personnages à qui il donne la parole. Ainsi, la logorrhée de la belle-mère d’Antoine est représentée par un flot de texte que vient n’interrompre aucun signe de ponctuation : irrespirable ! Le style jeune de Joséphine est bien exprimé et l’on a aucun mal à s’imaginer la jeune fille en colère.
En résumé, On ne voyait que le bonheur est un roman poignant qui aborde des sujets difficiles mais universels. Le désamour d’une mère, la perte d’un parent, les liens de fratrie ou encore l’infidélité sont autant de thèmes abordés par Delacourt. Si vous n’aimez pas les histoires de famille et les tragédies de couple, passez votre chemin ! En revanche, les amateurs d’émotions profondes et d’histoires qui finissent sur une belle note d’espoir sont au bon endroit. On sort bouleversé de ce récit ou apparaissent toutes les facettes de l’être humain : le pire comme le meilleur.
L’auteur :
Grégoire Delacourt est né en 1960 à Valenciennes. Après avoir été licencié, il crée sa propre agence publicitaire qu’il dirigera pendant plus de 20 ans. Il signe des contrats avec de grands noms tels que Unilever, Sephora ou encore Gallimard. C’est à l’âge de 50 ans qu’il écrit son premier roman L’écrivain de la famille. Deux ans plus tard, paraît La liste de mes envies, qui sera un best-seller et fera l’objet de deux adaptations : au théâtre et au cinéma. Son 3ème roman La première chose qu’on regarde lui vaut un procès contre l’actrice Scarlett Johansson. On ne voyait que le bonheur sort en 2014, est goncourable et remporte entre autre le titre de « Meilleur roman de l’année », par les journalistes du Parisien. Paru en avril 2015, Les quatre saisons de l’été parle, quant à lui, d’amour.
Le détail :
Les titres des nombreux chapitres font preuve d’originalité. Dans la première partie, ils représentent des chiffres, prix et autres dépenses («Deux fois trois cent francs», «Des notes de frais» ou «Toutes mes billes») faisant référence aux souvenirs évoqués dans le chapitre. On retrouve aussi des chiffres en guise de chapitrage dans la deuxième partie : 1922, ½ ou 4×4, toujours en rapport avec l’histoire. Enfin, les chapitres de la partie de Joséphine représentent des dates. Il faut suivre !
La parenthèse :
On ne voyait que le bonheur (chez J-C Lattès) est le roman le plus personnel de Grégoire Delacourt. En effet, l’auteur s’est inspiré de la perte de son propre père pour écrire cette histoire. Introspection, résurgence du passé et la quête de compréhension des liens familiaux sont autant de thèmes que l’écrivain a lui-même vécus. Il y exprime aussi l’infini tristesse qu’engendre la perte d’un parent.
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