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Ritournelle (Aoi Ikebe)

Ritournelle, quand la couleur prend la parole. 17/20

Synopsis:

Ce one-shot possède une intrigue qui peut paraître simple aux premiers abords : le quotidien d’un couvent de femmes. Nous y suivons une jeune orpheline Amilah, volontaire. Elle souhaite effectuer au mieux les tâches qui lui sont attribuées, afin de plaire aux sœurs supérieures, et notamment à celle qu’elle considère comme sa protectrice, sœur Marwena. Mais finalement tout n’est pas si simple. Soeur Marwena ne peut oublier un homme, elle qui doit se vouer à sa seule foi.

Critique:

Tout d’abord, Ritournelle fait dans l’originalité sur plusieurs plans. Le premier est son format. En effet, il est deux fois plus grand qu’un manga traditionnel. Cette taille laisse la place à des vignettes plus grandes. Chaque page comporte comme un cadre qui entoure les vignettes, nous mettant face à un tableau. La dessinatrice a décidé de jouer avec les formes de ces vignettes justement, ne créant pas un ensemble aligné. Au contraire, on y trouve beaucoup de cases en biais. Chaque page semble être un tableau offert à notre vue. C’est ainsi que l’élément le plus original du manga est la présence de couleurs sur toutes les pages. Cette œuvre est donc très graphique.

Il y a peu d’actions à proprement parler, mais nous avons souvent affaire à des scènes de vie au couvent. Chaque chapitre est nommé par une action, divisant ainsi le quotidien du lieu en différentes tâches : « La récolte », « La procession » etc. L’action passe beaucoup par les sous-entendus, tout se fait avec subtilité. On remarquera la justesse des sentiments notamment, avec des oppositions de caractère efficaces. Amilah est une jeune fille très pétillante, tandis que sœur Marwena est toujours représentée de manière mélancolique. On se doute dès l’ouverture du manga de son amour pour un homme, et d’une douleur intérieure ressentie par le personnage.

La beauté de l’intrigue se situe dans la figure de Marwena, personnage tout en subtilité et en délicatesse. L’ancrage dans un couvent peut surprendre au début, mais finalement il permet de créer un univers uniquement féminin, pour mieux l’opposer à la ville. L’auteur et l’éditeur insistent particulièrement sur le fait que ce couvent n’a pas pour objectif de représenter une religion ou un groupe ayant réellement existé. En effet Aoi Ikebe, l’auteur, crée un univers indéfini, sans aucune précision de lieu. Il s’agirait plus pour moi d’un lieu symbolique et universel, qui illustre les étapes d’une vie.

Car oui, il s’agit bien du parcours d’une vie. Même si le personnage de Marwena reste au centre de l’intrigue active, il n’en reste pas moins le personnage d’Amilah. Nous suivons la jeune fille, avec son envie de bien faire, sa découverte de la ville lors d’une procession, et l’évocation de ses propres doutes quant à la foi. A la fin du manga, nous la voyons adulte. Ritournelle, malgré le peu d’action, est d’une grande richesse. Il présente un vrai travail esthétique et narratif, car peu de paroles sont échangées. L’action passe par le dessin, les couleurs et les personnages. Les sentiments sont épurés, avec une envie de la part de l’auteur d’immerger son lecteur dans un monde sans repères concrets.

Pour moi ce one-shot peut toucher tout le monde. Il ne correspond pas à un réel genre, et par son originalité perturbe un peu les codes. Mais surtout il mérité d’être considéré comme une œuvre très esthétique. De ce point de vue, il plaira aux nombreux amateurs d’art.

L’auteur:

Aoi Ikebe est une mangaka dessinatrice et scénariste. Ce one-shot, Ritournelle, de la nouvelle collection Horizon aux éditions Komikku nous permet de découvrir pour la première fois en langue française une de ses œuvres. C’est une grande découverte, avec une mangaka à suivre.

Le détail:

L’aspect esthétique du manga passe essentiellement par le traitement de la couleur. En effet, l’auteur s’en sert pour exprimer les sentiments, bien plus qu’elle ne se sert des dialogues. Le couvent est souvent représenté dans des tons très pâles, opposé à la ville, représentée avec des couleurs beaucoup plus vives et chaleureuses. L’un des exemples les plus forts est une scène avec des prostituées, dans laquelle le rouge est omniprésent. De la même façon, au départ habillée en violet, Amilah la petite fille pétillante est à la fin vêtue de blanc. On remarque donc que les couleurs ne sont pas choisies au hasard. Chacune vient symboliser et amplifier un des éléments du récit.

La parenthèse:

Ritournelle est un one-shot. L’intrigue est donc conclue à la fin du tome. De fait, je trouve celui-ci particulièrement réussi. Nous suivons le quotidien d’un couvent tout en suivant l’évolution des personnages qui y vivent. Ainsi, la fin répond parfaitement au début, dans un mouvement cyclique de recommencement. Amilah, dans le même rôle que Marwena au début, est sollicitée par deux petites filles pour prendre le repas. L’homme présent au début du premier chapitre l’est aussi à la fin du dernier. Je trouve que la construction narrative est très bien menée par l’auteur, toujours dans un grand souci d’esthétisme.

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